Le premier corps. Zwei. Le second corps.
« Nous sommes Zwei. S'il manque l'une de nous, nous ne sommes plus Zwei et pourtant aucunes de nous ne porte de nom car nous sommes des horreurs de la nature. »
«
Réveille toi, réveille toi ! Ils arrivent ! » «
Qui arrivent ? » «
Des rafleurs, ils vont venir ! Je les entends ! » Zwei se réveille en vitesse,
elle avait raison. Les affronter ? Hors de question, Zwei ne tient plus à risquer sa vie. Elle se recouvre d'une cape géante et fuit aussi vite que le poids de son corps lui permettait, pas évident de courir à travers une forêt lorsque dame Gesetz faisait des caprices avec cet éclairage. «
Tu vas bien ? » «
Oui, oui, ne t'inquiète pas. » Si seulement Zwei pouvait se servir de ses ailes mais elles n'ont pas d'autres utilités que de ralentir sa course. Ne croyez pas qu'elle n'a pas déjà essayé de se les arracher mais c'est tout bonnement impossible. Il faudrait pouvoir les faire fondre mais elle n'y pense déjà plus. Zwei a peur, très peur, peur que les attaquants la repère et qu'elle fasse objet de gibier à chasser pour faire gonfler les richesses de ces truands sur le marché noir.
Une frayeur tangible qui émane de toutes ses éraflures qu'on a lui a jadis infligé que ce soit par ces chiens sanglants à la botte de cet homme que l'on nomme Hurle ou bien simplement par les gens d'ici que tu as pu croiser au cours de sa vie. Des bourreaux sans noms qui ne débordent que d'aversion à son égard parce qu'elle est une horrible horreur de la nature. Avant Zwei cassait tous les miroirs qu'elle pouvait croiser mais avec le temps elle a finit par accepter son apparence, lassée par toutes ces paroles empoisonnées. Zwei avait déjà compris du haut de ses douze ans qu'elle n'avait sa place nulle part et qu'il ne fallait compter que sur elle-même.
«
C'est bon, je crois que tu les as semé. » Zwei parcourra encore quelques mètres le temps de trouver une cachette, une grotte. «
Merci. Tu peux te rendormir, nous sommes sauves. » «
Bonne nuit. » Et voilà qu'elle repartait. Zwei défit les bandages qui recouvrait cette boule orange, elle luisait faiblement. Il fallait qu'elle reprenne son souffle. Elle caressa son ventre,
elle dormait déjà tranquillement et
elle ne reviendra pas avant un bon moment. Elle remit son bandage en place. Zwei s'entoura de ses ailes, il ne faudrait pas qu'elle prenne froid. Il faisait froid et noir mais elle ne pouvait pas se servir de son arme pour créer du feu, cela demandait trop de puissance . Tant pis, tant mieux ça évitera de se faire remarquer. Le temps passa, il n'y avait rien à entendre à part le bruit du vent faisant danser les branches des arbres. Dans un souffle Zwei commença à
lui parler.
«
Quel est ton souvenir le plus lointain ? Le mien remonte à si longtemps que je ne saurais pas te dire quel âge nous avions. Six, peut-être sept je ne sais plus très bien. Tu sais, je sens encore cette odeur chaleureuse de la maison où nous avions grandi. Du temps où Wald et Tompson étaient encore vivants. Il y avait aussi Jessica et Hanz qui nous ont recueilli comme leur propres enfants. » Zwei regardait attentivement
ses yeux clos, elle
lui déposa un tendre baiser sur le front puis poursuivit calmement. «
Cette maison, nous la connaissions par cœur parce que nous n'avions pas le droit de sortir, même de nous approchez des fenêtres. » C'était exactement la même obscurité que celle qui entoure ces deux corps ici présent. Zwei regarda son bras gauche, son arme longue et rectangulaire. Depuis quand n'a-t-elle pas servie ? Elle aimerait également s'en séparer mais elle reste une précieuse défense. «
Si ce bras ne nous servait pas à rester en vie, je crois bien que je l'aurais rendue invalide. Depuis la première fois où nous avons découvert à quoi il servait. Quand la première boule de feu qui a jailli a tué nos chers frères … Je me demande ce que sont devenus papa et maman, s'ils sont toujours en vie. Nous ne les avons pas revus depuis ce jour-là. Nous avions douze ans. Nous avions si peur, avait-on réellement d'autres options que celle de la fuite ? Non, nous aurions finit par les tuer eux aussi … » Les larmes coulaient sur ses joues, elle ne pouvait pas les essuyer, bientôt
son visage aussi sera mouillé. «
Nous n'avions nul part où aller, regarde ce que l'on est encore à présent après temps d'année. Nous sommes toujours en cavale. Mais heureusement que nous sommes encore toutes les deux, sans toi je ne suis rien. » Zwei resserra davantage son bras droit autour d'
elle. «
Un jour, tu verras, je trouverai un moyen de te soigner, tu n'auras plus à retomber en léthargie. » Cela faisait peine à voir. Souvent Zwei pensait que c'était à cause de son premier corps qui absorbait toute la puisse du deuxième, une hypothèse non vérifiée. L'eau avait arrêtée de couler de ses orbites. «
C'était triste quand Jessica et Hanz nous ont dit que nous n'étions pas leur vrais enfants mais ce n'étais pas grave parce que nous nous disions que ainsi nous n'avions pas fait souffrir Jessica si elle avait été notre mère biologique. Note naissance n'a pas du être facile. » Zwei se mit à chanter. Car quand bien même
sa conscience était déjà loin
elle l'entendait et voyait tout de ce que Zwei pouvait percevoir mais
elle ne pouvait intervenir ou faire quoi que ce soit. C'est pour cela que Zwei n'est pas une mais deux personnes. Que vous ayez affaire à l'une ou l'autre vous n'y verrez aucunes différences car elles possèdent le même caractère. Les deux corps finirent pas dormir ensemble, épuisés.
Il paraît qu'il existe une chimère à deux têtes.
Rafleur: Elle ferrait fureur sur le marché.
Rêveur: Possible … Ce n'est pas plutôt une légende pour faire peur aux enfants ?
Chimère: ...
Perdu: Une chimè-quoi ?
Natif: Oui, c'est ce qu'on raconte aux enfants pour qu'ils se calment. Sinon on leur dit que c'est Hurle-au-Vent qui viendra les chercher.